Article publié le 01/10/2024

Pénurie de logements en France : Les mesures proposées sont-elles à la hauteur des enjeux ?

 

La crise du logement en France atteint des proportions critiques, et le prochain gouvernement devra s’atteler à ce défi de taille. Mais les mesures envisagées par les partis politiques et les think tanks seront-elles suffisantes pour répondre aux besoins croissants ? Pas, si l’on en croit les mesures consensuelles qu’a compilées l’institut “Avant-garde”. Face à la crise majeure du logement que nous traversons avec la construction du neuf à l’arrêt et le renchérissement dans l’ancien dû à la hausse des taux d’intérêt qui freinent les transactions. Dans ce contexte, le prochain gouvernement est condamné à agir.

La crise du logement : Un défi urgent pour le prochain gouvernement 

Comme l’explique Pierre Sabatier, président de l’AUREP, (Association Universitaire de Recherche et d’Enseignement sur le Patrimoine), la pénurie de logement pénalise toute l’économie davantage que tout autre secteur d’activité. On peut même considérer qu’une partie du chômage provient de cette crise. Car si les gens ne peuvent pas se loger là où se trouvent les bassins d’emploi, un chômage structurel s’ensuit.

 

Pour lui, il est temps de changer la mentalité des gouvernements qui privilégient les instruments financiers, par une fiscalité plus avantageuse que celle octroyée à l’investissement dans l’immobilier, pourtant vital et ancré dans l’économie réelle.

 

L’inertie inhérente à des projets conduits sur le moyen terme fait qu’une mesure prise aujourd’hui ne produira pas de logement habitable avant plusieurs années. L’institut “Avant-garde”, (un think-tank parisien), a cherché dans les programmes des partis politiques, ayant le plus d’élus dans la nouvelle Assemblée, quels seraient les points sur lesquels un consensus pourrait se faire au-delà des antagonismes dogmatiques pour gouverner la France. Ce sont finalement 40 mesures sur 10 grandes thématiques qui sont autant de plus petits dénominateurs communs.

 

Nul doute que, quoi qu’il advienne, ces sujets seront portés par le prochain exécutif sous une forme ou une autre.

 

Une lecture rapide des cinq mesures proposées dans le segment “logement” du rapport montre qu’elles seront incapables de résoudre, avant la fin de la législature, la pénurie de logement. Attendu que chacune d’entre elles, devrait passer par une loi ou un PLF très rapidement, pour une mise en place au plus tard en 2025.

 

Les voici présentées in extenso (chaque mesure est évaluée pour son impact budgétaire probable).

Mesure 24 – Relance de la construction de logements sociaux

Description

Relancer la construction de logements sociaux

1. Retour de la TVA à taux réduit pour la production de logements sociaux (PPL Stéphane Peu)

2. Modulation de la réduction de loyers de solidarité (RLS) en fonction des efforts de construction et de rénovation des bailleurs.

3. Promotion des parcours de mobilité dans le parc social

 

Impact budgétaire

1. Impact budgétaire 500 M€ (Programme Pécresse)

2. Difficile à estimer, la RLS, aujourd’hui, représente une recette de l’ordre de 1,5 Md€

Mesure 25 – Soutien à la construction de logements abordables 

Description

Faciliter la production de logements, notamment de logements abordables 

1. Imposer une densité minimale pour les nouvelles constructions

2. Nouvelle aide aux “maires bâtisseurs” : aide forfaitaire (10 000 euros par logement correspondent à 25 % de la TVA sur le neuf environ pour une surface vendue 200 000 euros, équivalent à l’aide aux maires bâtisseurs de 100 euros par m²). Montant calculé sur une moyenne de logements construits et/ou transformés (à condition qu’ils aient été vidés auparavant et que ces travaux les remettent sur le marché) au cours des trois ou six dernières années. Le montant de l’aide serait majoré en cas construction d’un logement social. 

 

Impact budgétaire

1. Neutre 

Mesure 26 – Renforcement du prêt à taux zéro pour les ménages primo-accédants

Description

Renforcer le soutien à l’accession à la propriété via la prolongation et l’amplification du Prêt à Taux Zéro (PTZ) jusqu’en 2027, en l’ouvrant aux primo-accédants sans distinction géographique ou distinction neuf/ancien. 

 

Impact budgétaire

Le PTZ élargi, sans distinction géographique neuf/ancien équivaudrait au PTZ 2023, pour un coût de 1,2 Md€ (contre 800 M€ en 2024 avec l’introduction de ces critères). 

Mesure 27 – Encadrement de la location de meublés touristiques 

Description

Réduction de l’abattement fiscal de 71 % applicable aux revenus fonciers tirés des meublés de tourisme et aux chambres d’hôtes, à l’exception des zones de montagne ou des zones détendues qui bénéficieraient d’un régime dérogatoire. 

 

Impact budgétaire

Limité 

Mesure 28 – Valorisation et libération du patrimoine foncier de l’État 

Description

Création d’une foncière de l’État, avec un objectif de recensement, de libération et de valorisation du foncier existant. L’État dispose d’un patrimoine immobilier de 7 millions de m² de bureaux inutilisés ; ainsi que de 40 000 km² de terrains non bâtis. 

 

Impact budgétaire

Économie allant jusqu’à 2 Md€ à l’horizon 2027 

Conclusion

Comme souvent dans ce genre d’inventaire, les dernières propositions sont les plus fumeuses. Dans le cas de la mesure 27, lier la réduction de l’abattement fiscal sur les meublés de tourisme à une mesure pour débloquer la crise du logement n’est pas très sérieux. D’autres outils anti-location courte durée ont déjà montré leur efficacité. La mesure 28 est un constat discutable, en aucun cas une solution à court terme. Restent donc les trois premières mesures. Dans la mesure 24, en vue de relancer la construction de logements sociaux (le coeur du problème) on propose de ”Promouvoir des parcours de mobilité dans le parc social”. Sorties des voeux pieux, seules les mesures 25 et 26 semblent proposer des solutions déjà testées pour des résultats pas toujours probants. C’est donc d’un outillage d’un tout autre calibre qu’il va falloir se munir pour sortir le logement de l’ornière. 

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